Ocres jaunes et rouges
Ce furent probablement les premières couleurs utilisées par les artistes. Les peintures pariétales de la préhistoire en sont un exemple. Déjà à cette époque, les hommes savaient transformer en la chauffant l’ocre jaune en ocre rouge.
Selon Pline, ce sont les mines de fer qui produisaient l’ocre. Ensuite, elle était brulée en vase clos, il la nomme alors rubrique.
Théophile donne une recette d'ocre rouge obtenus par "conction“ d'ocre jaune.
Cennino Cennini (Ch. XLV) traite (De la nature d’une couleur jaune que l’on nomme ocre).
Fait cette remarque intéressante :
- « … un jour étant conduit par Andrea Cennini, mon père, allant à travers champs vers le col de Valdelsa …. . Arrivé dans un petit vallon à une grotte sauvage, je raclai la grotte avec un outil, et je vis différentes veines de couleur telles que l’ocre, la sinopie obscure et claire, de l’azur et du blanc (…) J’allais avec mon couteau à la veine, et je promets que jamais je ne dégustai une couleur plus belle et plus parfaite… jamais meilleure couleur que cet ocre n’exista. »
Ce qui démontre la multitude des variantes possibles dans les palettes des peintres au cours des siècles. Parce que qui trouvait ce type de filon devait l’exploiter à son compte et peut-être se garder d’en trop parler à ses pairs.
Les ocres sont d’origine naturelle et, de fait, il est impossible de leur attribuer des caractéristiques précises.
La couleur est due aux oxydes de fer : de la gœthite – FeO(OH) pour les ocres jaunes et pour les rouges, de l’hématite Fe2O3.
Le pourcentage d’oxyde de fer varie de 20 à ≤ 40 %, le reste est composé de quartz et d’argile.
Nuancier ocre et terres rouges
Nuancier ocres jaune
La terre de Sienne
Dans les temps anciens, on a toujours eu tendance à confondre terres et ocres.
Aujourd'hui, on les différencie plus nettement :
Les ocres étant jaunes, rouges, ou de teintes intermédiaires.
Les terres étant brunes, vertes ou noires.
Pourtant, la terre de Sienne est de couleur jaune (ou rouge), elle provient normalement de Toscane, de la région de Sienne (Italie).
De même que les ocres jaunes, la terre de Sienne est composée principalement d’hydroxyde de fer, mais également d’oxyde de manganèse en petite quantité (0,8 à 1,5%).
La calcination des terres de Sienne donne des terres de Siennes brûlées ou calcinées.
D’ailleurs, Turquet de Mayerne écrit :
- « L’ocre d’Italie peult être mise à l’eau, estant bruslée faict un rouge brun très beau. »
Les terres d'ombres et terres brunes
La terre d’ombre est proche chimiquement des ocres, on y trouve cependant un pourcentage élevé d’oxyde de manganèse (12 à 15% allant même quelquefois jusqu’à 20%.).
C’est une couleur à utiliser avec une extrême parcimonie et grande attention dans les huiles.
Le manganèse y est sous forme d’oxyde hydraté (les psilomélanes) responsable en réaction avec les produits acides se formant au cours du séchage du noircissement des peintures.
Mérimée écrit d’ailleurs :
- « Cette couleur a beaucoup de corps et est très siccative, surtout après qu’elle a été calcinée.
On lui reproche de pousser au noir ; mais ce n’est pas une raison pour ne pas l’employer. »
Les terres vertes
Les terres vertes, quant à elles, sont utilisées comme pigment, au moins depuis l'Antiquité grecque (notamment à Pella en Macédoine au IVᵉ siècle av. JC.).
Vitruve la cite comme venant de Smyrne (?) (7 ;7,4).
Pline ne l’appréciait que moyennement.
On la retrouve dans de nombreuses fresques sous l’empire romain ; au Moyen Âge, elle fut très largement employée tant en Occident qu’à Byzance. Elle servait à réaliser certains verdecio (verts composés) des italiens et entrait dans la composition du protoplasme chez les byzantins.
Déjà à l’époque d’Héraclius (X/XIᵉ siècle) la plus appréciée venait de Chypre. Il conseille de l’utiliser avec le “mucilage” de la mauve mêlée de vin ou de vinaigre.
Terres vertes
Cennino Cennini l'utilise pour teinter le parchemin ou le papier, comme “bol“ pour la pose de l’or et pour tous autres
usages :
- « Il y a un vert qui est une terre naturelle… elle est de nature très grasse et bonne à employer pour les visages, les vêtements, les maisons ; à fresque, à sec, sur mur, sur tableau et partout ou tu veux… De même que du bol, je t’enseignerai pour dorer, de même on peut s’en servir pour fixer l’or ; et sache que les anciens ne se servaient pas d’autres mordant que ce vert pour dorer sur panneau. »
Différentes terres vertes
Une terre verte est une roche (un mélange de minéraux) dont l’un au moins est vert.
Deux minéraux sont responsables de cette teinte : la céladonite ou la glauconie.
Elles sont un composé d’aluminosilicate hydraté de fer, de potassium, de magnésium de formule générique :
K(Fe’’’.Al).(Mg,Fe’’).Si4O10.(OH)2
Il existe deux types de terres vertes :
- D'origine hydrothermale : composée de céladonite (terre de Véronne, de Chypre…)
- D'origine sédimentaire : composée de glauconie ou de la chlorite verte et divers minéraux, (calcite, quartz…)
En détrempe ou à l’huile, elle n’a que peu de “corps”.
Toutefois, si son usage seul n’est pas recommandé sur parchemin, (c'est une couleur qui est difficile à travailler) elle sera particulièrement appréciée en glacis d’huile.
Procédé de fabrication des ocres
Voir aussi : préparation d'une ocre rouge.
Recueillies à l'état brut dans la nature, les terres colorées sont souvent impures et mélangées à des sables. Pour obtenir des teintes fraîches, il faut les laver, les concentrer et les défaire de leurs imperfections.
Mélangé à l’eau, le sable ocreux se sépare en deux frontons :
Le quartz tombe au fond, tandis que l'argile et l'oxyde coloré restent en suspension.
Ce liquide est recueilli.
L'ocre est le résidu obtenu après évaporation, d’autant plus prisé que sa granulométrie est fine et régulière.
(Ci-dessous : Travail d'une ocre issue d'une veine découverte par Madame Monique Devic dans les Hautes-Pyrénées).
Pigment sec en masse.
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