Les ocres artificielles, le caput mortuum et l'oxydule de cuivre
Ocres artificielles :
(Voir aussi « Terres et ocres »)
Il est probable que la production d'ocres rouges obtenue par chauffage de l’ocre jaune remonte à la nuit des temps.
Toutefois, les recettes de fabrication d’oxydes de fer rouges, résultat de la distillation sèche du vitriol de Mars, semblent ne voir le jour qu’à la fin du XVᵉ siècle.
En chauffant l’ocre jaune au-dessus de 250°C, (*) l’oxyde de fer hydraté se déshydrate et se transforme en ocre rouge. Ces procédés sont déjà connus des romains.
Ainsi :
Pline (Liv. XXXV) : « De la rubrique brûlée se fabrique l’ocre (?) … l’on (fabrique) l’ocre rouge en calcinant de l’ocre jaune dans des pots neufs »
Théophraste : « On brule l’ocre pour en obtenir la rubrique ».
Plus la température s’élève et plus le temps de chauffage est long, plus l’ocre jaune virera vers un pourpre (à partir de 800 °C) voire, ≤ 1000° C, un oxyde noir.
Il est donc crucial de surveiller attentivement les températures et le temps passé au four !
Turquet de Mayerne en donne différentes recettes : (F° 11-85-122)
- « L’Ocre d’Italie peult être mise en eau estant bruslée faict un rouge brun très beau moyen entre le Braunrot commun et la Lacque. »
- « English ocer, est l’ocre jaune, laquelle brusléz donne un beau rouge obscur qui ne meurt point. »
- « Un beau rouge. Prenés de l’ocre jaune très pure, méttés la dans un creuset… . Méttés le creuset dans un feu vif et faicte rougir par l’espace de 2 heures, pour le moings, Que votre ocre soit toute rouge de feu, tiré le creuset et le laissés refroidir, vous aurez une couleur rouge presque comme le cynabre… . »
Préparation d'une ocre rouge
à partir d’une ocre jaune
des Pyrénées.
Oxydes de fer rouges – Le caput mortuum :
Le nom même de “caput mortuum ” (tête de mort, tête morte) nous rappelle les anciens termes alchimiques.
Ce “résidu misérable” de fond de cornue deviendra un produit d’excellence pour le peintre médiéval.
En 1584 G.P. Lomazzo fait une nette distinction entre le « Morello di ferro » (oxyde naturel de fer) et le « Vitriuolo Romano abbruciato » (vitriol romain calciné).
C’est par la distillation sèche du sulfate de fer que l’on obtiendra « l’huile de vitriol » (acide sulfurique).
Le caput mortuum en est alors le résidu.
Son utilisation fut certainement dans un premier temps relativement confidentielle.
La couperose verte (**) se décompose à partir de 500°C (le gaz est récupéré pour fabriquer l’acide sulfurique).
Il peut être chauffé plusieurs jours en fonction de la nuance recherchée.
Le caput mortuum sera ensuite lavé pour enlever le sel, puis séché et broyé.
Préparation d'un caput mortuum :
Tout comme les ocres rouges issues du chauffage de l’ocre jaune, il répond à la formule Fe2O3.
(*) C’est ≤ à 600°C que la gœthite (corps responsable de la couleur jaune) perd la totalité de son eau. On obtient alors un oxyde de fer correspondant à l’hématite.
(**) Ne pas confondre avec la couperose bleue – sulfate de cuivre, ou couperose blanche – sulfate de zinc.
L'oxydule de cuivre
L’oxydule de Cuivre est un pigment assez récent.
L’oxyde de cuivre fabriqué (Cu2O) est probablement un des plus vieux antifouling et par contact avec l'air humide, il se transforme en CuO, donc en noir de cuivre.
On ne trouve pas trace de son utilisation avant le XVIIIᵉ…
Il n'est pourtant pas très difficile d'en obtenir en faisant bouillir de l'acétate de Cuivre avec du sucre.
Cependant, la simplicité de la recette ne peut pas nous permettre d'en déduire que les médiévaux l'utilisaient.
Toutefois :
- C'est aussi un minéral que l'on trouve à l'état naturel dans les mines de cuivre sous le nom de cuprite : par pseudomorphose, la pierre se transforme généralement en malachite.
- l y a dans le ms. d'Éraclius une allusion à un oxyde de cuivre qui peut faire penser qu'il s'agit du Cu2O. Mais, la recette n’est toutefois pas assez explicite pour qu’elle puisse être retenue.
- lors de préparations de "verts au sel" (chlorure de sodium et urine) on trouve quelques rares fois, outre l'oxydation vert clair, une autre oxydation rouge correspondant à la formule Cu2O. Ce qui laisse à penser qu’il est statistiquement probable que le phénomène se soit produit par le passé. (Mais comme pour le caput mortuum , ce devait être une utilisation très confidentielle.)
- Ce qui peut expliquer que nous soyons dénué de recette probante et d'analyse (actuellement) prouvant son utilisation au Moyen Âge.
La fabrication du caput mortuum est dangereuse.
(intoxication par les vapeurs acides). Prendre garde à ces dernières lors du premier temps de cuisson.
À ne pas recommander sans expérience. Faire preuve de multiples précautions de sécurité.
Prendre des mesures de précautions personnelles : gants, masque à gaz, combinaison...
NE PAS REJETER LES EAUX OU AUTRES LIQUIDES DANS LA NATURE.
LES STOCKER DANS DES CONTENANTS SPÉCIAUX ET LES REMETTRE
À UN CENTRE SPÉCIALISÉ DANS LE RETRAITEMENT DES PRODUITS DANGEREUX
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